Melun - Fontainebleau. « Un stage un peu moraliste » pour les clients de prostituées
Le Parisien - 26/06/2017
Brèves rencontres avec des clients de prostituées, en stage de sensibilisation, dans les locaux d’une association, à Melun, ce lundi.
À la sortie de la session du jour, à Melun, les treize hommes se dispersent très rapidement. « C’est un stage un peu moraliste », lâche un quinquagénaire. Ces lundi et mardi, ces personnes âgées de 25 à 81 ans et de diverses professions participent à un stage de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels. À la place d’une amende, pouvant monter jusqu’à 1 500 euros, les contrevenants à la loi du 13 avril 2016, se sont vus proposer ces deux journées à 180 euros.
Ces stagiaires d’un nouveau genre étudient les grands principes du droit et écoutent l’intervention d’une association pour évoquer les exploitations sexuelles, les systèmes de protection et de réinsertion des prostituées et les conséquences sociétales. « On travaille depuis le début de l’année sur ce programme », précise Jean-Claude Faivre, le président de l’association de l’Acjuse (Association de contrôle judiciaire socio-éducatif), qui s’occupe de l’organisation de ces stages en Seine-et-Marne.
« On culpabilise un peu, c’est vrai », confie le même homme, avant de se justifier. « Je fais un travail spécial, commercial, et on est souvent loin de chez nous. Ailleurs, il y a des maisons closes », ose le contrevenant, avant de reconnaître qu’il a de la chance de ne pas payer l’amende. Un autre quinquagénaire, également souvent sur les routes, parle « de pulsion », en voyant les jeunes femmes sur le bas-côté.
« Quelle que soit la forme de prostitution, c’est une violence »
« Nous sommes les porte-parole des prostituées pour évoquer la violence de leur vécu, explique Étienne Laurent, coordinateur national formation et prévention de l’Amicale le Nid, association qui travaille au quotidien avec les prostituées. Quelle que soit la forme de prostitution, c’est une violence psychique, physique et sociétale. » Il a notamment expliqué les degrés divers de pressions subies, « comme les maraboutages des Nigériennes » ou « les pressions sur la famille restée au pays pour les Bulgares ».
Des explications qui n’atteignent pas toujours leur cible. « On sait déjà qu’elles ne sont pas libres mais quand j’y vais, je ne pense pas à cela », explique un jeune artisan, qui effectue ce stage comme il effectuerait une peine.
Le contrevenant voit les choses crûment. « Nous sommes dans une société où tout s’achète. Je suis un consommateur et je cherchais de la viande », commente le trentenaire, avec cynisme et peut-être un brin provocateur.
« L’important demeure l’instauration du dialogue sur ces questions, notamment les rapports hommes/femmes, insiste Étienne Laurent, pas dupe pour autant. C’est un début. »
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